De Brouckère, Lucia (1904-1982)

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De Brouckère, Lucia (1904-1982)

Chimiste et première femme professeur dans une faculté des sciences en Belgique à l'Université libre de Bruxelles en 1945. Elle est née le 13 juillet 1904 à Saint-Gilles et morte le 3 novembre 1982 à Ixelles (Bruxelles)

Biographie

La jeune Lucia grandit dans la famille du célèbre politicien socialiste Louis de Brouckère et est fortement influencée par son militantisme. Au début de la Première guerre mondiale, la famille fuit en Angleterre où Lucia suit une grande partie de sa formation secondaire. Dans les années 1920, elle s’inscrit à l’université libre de Bruxelles. Elle opte l’étude de la chimie. Selon l’historienne Brigitte Van Tiggelen ce choix est inspiré par la chef de travaux : Daisy Verhoogen qu’elle considère comme un modèle. En 1932, De Brouckère obtient sont titre de docteur en sciences chimiques. Sa thèse porte sur L’absorption des électrolytes par les surfaces cristallines et est couronnée par l’Academie royale. Au début de l’année académique suivante, le conseil d’administration de l’université propose à De Brouckère un poste d’assistant dans le laboratoire de Jean Timmermans. Celle-ci obtient en 1933, son diplôme d’agrégation. Elle peut dès lors enseigner à l’université et peut également aspirer à un poste de chef de travaux. Cette fonction lui permet de faire partie du personnel scientifique permanent de l’université. En effet, les chefs de travaux sont les bras droit des professeurs et supervisent les travaux pratiques des étudiants.
Suite à cette nomination, qui n’est effective que quelques années plus tard, De Brouckère accède à la plus haute fonction académique occupée par une femme à cette époque. Six an plus tard Yvonne Désirant, sa collègue chimiste obtient un poste à l’Université de Gand. L’université bruxelloises compte plusieurs femmes maitre de travaux dont Verhoogen, Hortense van Risseghem (depuis 1937) et Polina Mendelejev (depuis 1932). Ce titre ouvre habituellement à une carrière professorale. [1] . Elle obtient un poste de chargé de cours en 1937 ce qu’aucune femme belge n’avait obtenu jusqu’alors.[2]
Pendant la deuxième guerre mondiale, De Brouckère fuit à Londres où elle participe à la recherche en chimie pour des besoins militaires mise en place par le gouvernement en exil. Après 1944, elle dirige au sein du ministère de l’économie la section de chimie industrielle. Cette fonction importante et ses services lors du conflit lui permettent d’espérer une promotion en rentrant en Belgique. En 1945, elle obtient en effet une chaire à l’université. Cette nomination constitue une nouvelle étape puisqu’elle est alors la première femme qui devient professeur ordinaire dans une Faculté des sciences belge. Une des tâches principale de De Brouckère en tant que professeur dans les années d’après guerre est de réorganiser le département de chimie de l’université pour en faire un environnement propice à l’enseignement et à la recherche. Elle fait évoluer le programme au sein duquel la chimie générale devient une branche à part entière. Elle invite également des intervenants étrangers. Parallèlement, elle est directrice du laboratoire de chimie générale et en 1951 elle prend la tête du laboratoire de minéralogie et d’analyse.
Les recherches de De Brouckère dans les années 1950 portent sur les colloïdes et les macromolécules. La chercheuse travaille pendant un temps en étroite collaboration avec Ilya Prigogine et se consacre à cette occasion à la thermodynamique et à la phase liquide. En tant que professeur cependant, elle s’intéresse surtout à l’enseignement. Au fur et à mesure des années, elle devient titulaires de nombreux cours importants au sein du cursus de chimie : elle enseigne entre autres la chimie générale, la chimie analytique et la chimie physique. Elle publie différents manuels et contribue à la formation des futurs professeurs de chimie. Elle est vice-doyen et ensuite doyen de 1960-1962 de la faculté des sciences. En 1974, elle accède à l’éméritat. Elle n’est plus l’unique femme du paysage académique et crée le fonds Lucia De Brouckère pour soutenir les jeunes chercheurs en chimie. En 1983, un an après son décès une fondation Lucia de Brouckère est créée pour promouvoir les sciences.
À côté de son parcours universitaire, De Brouckère est également présidente de la Société belge de Chimie à partir de 1958. Elle est membre du conseil d’administration de l’IRSIA et de la fondation universitaire. En tant que co-fondatrice des jeunesses scientifiques de Belgique, elle participe à la découverte des sciences auprès des jeunes. Ses recherches sont couronnées, elle remporte entre autres le Wetremsprijs en 1953.
En tant que libre penseur, De Brouckère est sa vie durant un ardant défenseur des valeurs démocratiques. En 1934, elle devient la première présidente du Comité mondial des femmes contre la guerre et le fascisme. Elle défend particulièrement l’idée d’une recherche libre et indépendante selon les statut de l’Université libre de Bruxelles. Après les soulèvements étudiants de 1968, elle est élue présidente de la commission de réforme de l’ULB. Elle est également présidente du Centre d’Action Laïque au sein duquel elle lutte pour la suspension de la loi anti-avortement.


Publications

  • Chimie générale, 1971.


Bibliographie

  • GUBIN, Eliane, JACQUES, Catherine, PIETTE, Valérie, en PUISSANT, Jean, Dictionnaire des femmes belges: XIXe et XXe siècles, Brussel, 2006, p. 139.
  • VAN DE VYVER, Gisèle et LEMAIRE, Jacques (éd.),. Science et libre examen, un hommage à Lucia de Brouckère, Bruxelles, 1993.
  • VAN TIGGELEN, Brigitte, “Lucia De Brouckère (1904-1982)”, ans Jan Apotheker en Livia Simon Sarka, European Women in Chemistry, Weinheim, 2011.

  1. Selon l’historienne Brigitte Van Tiggelen, le recteur prévient cependant De Brouckère qu’elle ne doit pas trop y compter.
  2. Irène Van Der Bracht est nommée depuis 1919 professeur d’éducation physique à l’ université de Gand et après 1925, elle devient professeur ordinaire.