De Donder, Théophile Ernest (1872-1957)
Physicien et chimiste, considéré comme fondateur de la thermodynamique des processus irréversibles. Né le 19 août 1872 à Schaerbeek et décédé le 11 mai 1957 à Bruxelles.
Contents
Biographie
De Donder travaillait comme professeur de mathématiques à l'Athénée de Saint-Gilles lorsqu’en 1899 il obtint son doctorat en mathématiques et en physique à l’Université de Bruxelles.[1] Après avoir terminé son doctorat, De Donder effectua un stage chez Henri Poincaré. A partir de 1911, il enseigna le cours de physique mathématique à la Faculté des Sciences et des Sciences Appliquées de l’Université de Bruxelles et après la Première Guerre mondiale, il fut promu à la chaire de physique mathématique. De Donder y donna des cours sur la thermodynamique et la chimie physique. [2] Via son élève Frans Van den Dungen, ces cours devinrent l'un des points de départ de l'Ecole bruxelloise de thermodynamique rendue célèbre par Ilya Prigogine.[3] Maurice Nuyens, Léon Van Hove, Jacques Van Mieghem et Georges Lemaître étaient élèves de De Donder. C'est de cette manière que prit forme une école belge de la théorie de la relativité.
De Donder fut admis à l'éméritat en 1942.
Le mathématicien fut nommé en 1919 membre correspondant et en 1929 membre de l'Académie royale des Sciences et Belles-Lettres de Bruxelles. En 1937, il fut élu directeur de la Classe des Sciences.[4] De Donder était cofondateur et premier président de la Société Belge de Mathématique. Dès 1924, il prit également une part active au sein des Congrès Solvay. En outre, il siégea dans le conseil d'administration du FNRS et dans le jury international du Prix Francqui. Il était président du Conseil Scientifique de l'Observatoire royal. Il fut également lauréat du Prix Décennal des Mathématiques Appliquées décerné par le Gouvernement belge pour la période 1913-1922. [5] En plus d’être un scientifique, De Donder était également un musicien doué, qui composa plusieurs morceaux pour piano.
En 1958, un an après sa mort, le Prix Théophile De Donder fut fondé en son honneur.
Travaux
De Donder était un auteur productif : il écrivit plus de deux cents articles et communications et une dizaine de livres. Il tint également une abondante correspondance avec des collègues de renom tels que Louis-Victor Broglie, Arthur Eddington, Hendrik Antoon Lorentz, Vito Volterra et Albert Einstein.[6] La thèse de De Donder était intitulée Sur la Théorie des Invariants Intégraux. Après un séjour à Paris, où il travailla chez Henri Poincaré, il continua à se consacrer à la théorie des invariants intégraux, au calcul des variations et à la théorie de la relativité.[7]
Publications relatives aux Mathématiques
A l’Université libre de Bruxelles les idées et l'enthousiasme de De Donder furent à la base d’une tradition florissante de mathématiques. Grâce à Théophile Lepage, un élève de De Donder, le calcul différentiel externe reçut de nouvelles applications. [8] Influencé par son maître Poincaré, De Donder développa la théorie des invariants intégraux et fit oeuvre de pionnier dans ce qui serait appelé plus tard la théorie des “formes différentielles externes”. Cette dernière était irremplaçable en mathématiques et en physique théorique. Dès 1904, De Donder utilisa les ouvrages d'Elvin Christoffel (1829-1900), Gregorio Ricci (1853-1925) et Tullio Levi-Civita (1873-1941) sur le “calcul différentiel absolu”.[9] Le travail de Joseph Marie De Tilly sur la mécanique abstraite fut également pour lui une source d'inspiration.[10]
La théorie de la relativité d’Einstein
Relativiste convaincu, De Donder suivit dès 1914 avec vif intérêt les recherches d’Albert Einstein. En 1916, suite à la publication de Grundlage der allgemeinen Relativitätstheorie par Einstein, le mathématicien belge fut l'un des premiers scientifiques à correspondre avec le savant allemand sur sa théorie de la gravitation et de la relativité générale. Étant l'un des rares physiciens à comprendre la théorie de la relativité à cette époque, De Donder fut le principal acteur dans la réception des théories d'Einstein en Belgique. Non seulement il sut transmettre à ses élèves, en particulier à Jules Géhéniau, son enthousiasme pour la théorie d'Einstein; mais aussi dans ses propres études, il développa et propagea les idées d’Einstein, et les élabora sur certains points. C'est ainsi qu'il publia en 1922 l'important ouvrage « La gravifique einsteinienne », dans lequel il s'efforçait de traduire la relativité générale dans le langage des principes variationnels. Son point de vue mathématique différait parfois complètement du point de vue physique d'Einstein. L'influence des cours et des travaux de De Donder s'avéra décisive pour l'histoire de la relativité générale et de la cosmologie en Belgique .[11]
A partir de 1920, De Donder étudia avec Henri Vanderlinden des solutions des équations d'Einstein correspondant à un espace à symétrie sphérique (mais pas nécessairement homogène), et les équations du champ gravitationnel en présence d'une source de champ électromagnétique. .[12]
Thermodynamique
En thermodynamique, De Donder introduisit une nouvelle formulation de la deuxième loi, basée sur le concept d'affinité. Malgré sa préférence pour les théories physiques fondamentales et les formulations mathématiques abstraites, il prit tôt conscience du potentiel d'application d'une thermodynamique chimique basée sur le concept de l'affinité, une fonction d'état associée au non-équilibre. Il développa une corrélation entre l'affinité chimique et l'énergie libre de Gibbs. Cela déboucha sur le développement et l'expansion de la thermodynamique des processus irréversibles. Ici, De Donder ouvrait une brèche vers la cinétique.
Avec le développement de cette théorie, De Donder devint le fondateur de l'Ecole bruxelloise de thermodynamique des processus irréversibles et de la physique mathématique. Lui et son école furent les seuls à cette époque à s'occuper de la conception de théories réellement créatives. [13] C’est son élève Ilya Prigogine qui devait développer et compléter la théorie de De Donder, sous la direction duquel il rédigea sa thèse. Sous l'impulsion de Raymond Defay, une extension systématique de la thermodynamique incorporant des effets de surface a été développée.[14] L'Ecole de De Donder exerça une influence décisive sur le jeune Georges Lemaître.
Physico-chimie des interfaces
La physico-chimie des systèmes de basse dimension (électrodes, membranes, surfaces catalytiques, micro-émulsions, films) attira l'attention des chercheurs belges. Un des premiers ouvrages en la matière, consacré aux piles galvaniques, est de la main de De Donder, en collaboration avec son élève Georges van Lerberghe.[15]
Publications
Parmi les ouvrages de De Donder, on connaît entre autres :
- Sur la théorie des invariants intégraux, Thèse, 1899.
- Théorie du champ électromagnétique de Maxwell-Lorentz et du champ gravifique d'Einstein, Paris, 1917.
- La gravifique Einsteinienne, 1921.
- Introduction à la gravifique einsteinienne, 1925.
- Théorie des champs gravifiques, Paris, 1926.
- The Mathematical Theory of Relativity, Cambridge, 1927.
- Application de la gravifique einsteinienne, Paris, 1930.
- Application de la gravifique einsteinienne à l'électrodynamique des corps en mouvement, Paris, 1932.
- Théorie invariantive du calcul des variations, Paris, 1935.
- Thermodynamic Theory of Affinity: A Book of Principles, Oxford, 1936.
- The Mathematical Theory of Relativity, Cambridge, 1937.
Bibliographie
- Marage, Pierre, "De kernfysica en de deeltjesfyscia", in: Histoire des sciences en Belgique, 1815-2000 sous la dir. De Robert Halleux, t. 2, Bruxelles, Dexia/La Renaissance du Livre, 2001
- Lambert, Dominique,"De algemene relativiteit en de kosmologie", in: Histoire des sciences en Belgique, 1815-2000 sous la dir. De Robert Halleux, t. 2, Bruxelles, Dexia/La Renaissance du Livre, 2001
- Nicolis, Grégoire, "De thermodynamica, de wetenschap van het niet-lineaire en de statische mechanica", in: Histoire des sciences en Belgique, 1815-2000 sous la dir. De Robert Halleux, t. 2, Bruxelles, Dexia/La Renaissance du Livre, 2001.
- Glansdorff, Paul, ,"Théophile De Donder", in:Ciel et Terre, 73, 354-356.
- Mawhin, Jean,"De wiskunde", in: Robert Halleux, Geert Vanpaemel, Jan Vandersmissen en Andrée Despy-Meyer (éds.), Histoire des sciences en Belgique, 1815-2000, Bruxelles : Dexia/La Renaissance du livre, 2001, vol. 1,.
- De Donder, Théophile, in: Biographie Nationale, 37(1971), 240-245.
- Glansdorff, Paul, Bosquet, Jean et Géhéniau, Jules, "Notice sur Théophile De Donder", in: Annuaire Académie Royale de Belgique, (1987).
- Van den Dungen, Frans, "Théophile De Donder", in: Revue de l'université de Bruxelles, 10 (1958), nr. 4-5, 293-302.
- Géhéniau, Jules, "Théophile De Donder 1872-1957", in: Florilège des Sciences, 1968, 169-182.
- Les Archives de l'ULB détiennent plusieurs publications et notices de ou concernant Théophile De Donder.
Notes
- ↑ Un de ses élèves à l'Athénée était Raymond Defay. Grégoire Nicolis, "De thermodynamica, de wetenschap van het niet-lineaire en de statische mechanica" , in: Histoire des sciences en Belgique, 1815-2000 sous la dir. De Robert Halleux, t. 2, Bruxelles, Dexia/La Renaissance du Livre, 2001, 167.
- ↑ Pierre Marage, “La physique nucléaire et la physique des particules », in : Histoire des sciences en Belgique, 1815-2000 sous la dir. De Robert Halleux, t. 2, Bruxelles, Dexia/La Renaissance du Livre, 2001, 89.
- ↑ Marage, "De kernfysica en de deeltjesfyscia", 85.
- ↑ Glansdorff, "Théophile De Donder", 54.
- ↑ Glansdorff, "Théophile De Donder", 354.
- ↑ Jean Mawhin, "De wiskunde", in: Robert Halleux, Geert Vanpaemel, Jan Vandersmissen en Andrée Despy-Meyer (éds.), Histoire des sciences en Belgique, 1815-2000, Bruxelles : Dexia/La Renaissance du livre, 2001, vol. 1,, 107.
- ↑ Pierre, "De kernfysica en de deeltjesfyscia", 131.
- ↑ Mawhin, "De wiskunde", 71.
- ↑ Mawhin, "De wiskunde", 106.
- ↑ Mawhin,"De wiskunde", 111.
- ↑ Marage, "De kernfysica en de deeltjesfyscia", 81.
- ↑ Dominique Lambert,"De algemene relativiteit en de kosmologie", in: Histoire des sciences en Belgique, 1815-2000 sous la dir. De Robert Halleux, t. 2, Bruxelles, Dexia/La Renaissance du Livre, 2001, 131.
- ↑ Nicolis, "De thermodynamica, de wetenschap van het niet-lineaire en de statische mechanica",156.
- ↑ Nicolis, "De thermodynamica, de wetenschap van het niet-lineaire en de statische mechanica", 167.
- ↑ Nicolis, "De thermodynamica, de wetenschap van het niet-lineaire en de statische mechanica", 167.