Difference between revisions of "Institut de Médecine tropicale Princesse Astrid"
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<br/>Une maladie particulièrement cruelle était la maladie du sommeil, transmise par la mouche tsé-tsé. Après des épisodes de fièvres, d’épuisement, d’épilepsie, de confusion, elle entraînait presque toujours la mort. La mouche infectée, qui à l’origine vivait dans des zones isolées par leur environnement naturel ou délaissées par les indigènes, se répandit à partir de la fin du XIXe siècle le long des rives du fleuve Congo, dans le sillage et à l'insu des marchands, missionnaires, fonctionnaires et explorateurs coloniaux. De même, elle pénétra l’intérieur du pays grâce aux voies de chemin de fer et au transport routier. La rupture des barrières sanitaires écologiques, respectées par les indigènes, en conséquence de l’augmentation de la mobilité, des déplacements forcés de population, des corvées de portage et des constructions irréfléchies de comptoirs coloniaux en plein milieu des zones infectieuses, déclencha en 1899 une première vague d’épidémie qui répandit la mort parmi les Congolais et les occupants européens. Dans le bassin humide du Bas-Congo, la mortalité causée par la maladie du sommeil atteint même un taux de 85%. L’épidémie causa la mort de huit millions de personnes dans cette zone. À l’époque de l’État Indépendant du Congo, à peine deux Européens sur trois survivaient à l’aventure coloniale. | <br/>Une maladie particulièrement cruelle était la maladie du sommeil, transmise par la mouche tsé-tsé. Après des épisodes de fièvres, d’épuisement, d’épilepsie, de confusion, elle entraînait presque toujours la mort. La mouche infectée, qui à l’origine vivait dans des zones isolées par leur environnement naturel ou délaissées par les indigènes, se répandit à partir de la fin du XIXe siècle le long des rives du fleuve Congo, dans le sillage et à l'insu des marchands, missionnaires, fonctionnaires et explorateurs coloniaux. De même, elle pénétra l’intérieur du pays grâce aux voies de chemin de fer et au transport routier. La rupture des barrières sanitaires écologiques, respectées par les indigènes, en conséquence de l’augmentation de la mobilité, des déplacements forcés de population, des corvées de portage et des constructions irréfléchies de comptoirs coloniaux en plein milieu des zones infectieuses, déclencha en 1899 une première vague d’épidémie qui répandit la mort parmi les Congolais et les occupants européens. Dans le bassin humide du Bas-Congo, la mortalité causée par la maladie du sommeil atteint même un taux de 85%. L’épidémie causa la mort de huit millions de personnes dans cette zone. À l’époque de l’État Indépendant du Congo, à peine deux Européens sur trois survivaient à l’aventure coloniale. | ||
− | <br/>En 1894, un laboratoire bactériologique fut donc fondé dans la capitale, Boma, avec le soutien royal. Les professeurs d’université [[Denys, Joseph (1857-1932)|Joseph Denys]] et [[Firket, Charles (1852-1928)|Charles Firket]] accordèrent leur soutien au projet. Deux assistants de Denys, dont [[De Marbaix, Henri (1868-1896)|Henri De Marbaix]], furent désignés pour régler les aspects pratiques de la mise en place. L’institut n’eut cependant pas beaucoup de succès. De Marbaix arriva en 1894 à Boma, apportant son savoir et son expérience. Il s’était formé grâce à des séjours d’études en Inde et aux États-Unis, et grâce à des stages auprès du célèbre physiologue Hoppe-Seyler à Strasbourg et à l’Institut Pasteur de Paris. Deux ans plus tard, il était atteint par une maladie et décédait, peu après son rapatriement. Il ne parvint pas à mettre par écrit ses observations. Le successeur de De Marbaix, [[Van Campenhout, Jean-Emile|Jean-Émile Van Campenhout]] n’arriva | + | <br/>En 1894, un laboratoire bactériologique fut donc fondé dans la capitale, Boma, avec le soutien royal. Les professeurs d’université [[Denys, Joseph (1857-1932)|Joseph Denys]] et [[Firket, Charles (1852-1928)|Charles Firket]] accordèrent leur soutien au projet. Deux assistants de Denys, dont [[De Marbaix, Henri (1868-1896)|Henri De Marbaix]], furent désignés pour régler les aspects pratiques de la mise en place. L’institut n’eut cependant pas beaucoup de succès. De Marbaix arriva en 1894 à Boma, apportant son savoir et son expérience. Il s’était formé grâce à des séjours d’études en Inde et aux États-Unis, et grâce à des stages auprès du célèbre physiologue Hoppe-Seyler à Strasbourg et à l’Institut Pasteur de Paris. Deux ans plus tard, il était atteint par une maladie et décédait, peu après son rapatriement. Il ne parvint pas à mettre par écrit ses observations. Il fallut attendre trois années avec qu'un nouveau projet, sous l'égide de la Société Belge d'Études coloniales, ne redonne vie au laboratoire. Le successeur de De Marbaix, [[Van Campenhout, Jean-Emile|Jean-Émile Van Campenhout]] n’arriva en 1899. Il avait préalablement approfondi ses connaissances par des formations, notamment en matière de pathologie de la malaria. |
− | <br/>La même année, le laboratoire déménagea à Léopoldville, sous la direction de Van Campenhout. Un siège plus logique, car cette implantation sur la rive sud du fleuve Congo était en plein développement. Il s’agissait du dernier port navigable avant les Chutes Livingstone, et la connexion avec l’hinterland par le chemin de fer avait été établie. Cela faisait de la petite ville un comptoir commercial cruciale et un nœud de communications avec l’intérieur des terres. Le laboratoire fut donc transféré pour de bon dans un bâtiment en 1899 (ou dans la décennie qui suivit). Avec sa façade de pierres blanches, son jardin soigné sur le devant et plusieurs locaux bien éclairés, l’ensemble ne manquait pas d’élégance. Tout comme son prédécesseur, [[Van Campenhout, Jean-Emile|Jean-Émile Van Campenhout]] faisait de la recherche, mais il travaillait aussi avec les équipes de l’hôpital et prenait des notes sur le climat. Lui aussi dut être rapatrié au cours de l’été de l’année suivante, pour des raisons de santé. Il coucha sur papier ses découvertes scientifiques, dans la publication : ''Rapport sur les travaux de la mission médicale au Congo, pendant les années 1899 et 1900 à Boma et à Léopoldville'', 1901 (en collaboration avec Dryepondt). Van Campenhout fut immédiatement remplacé par [[Broden, Alphonse (1875-1929)|Alphonse Broden]]. | + | <br/>La même année, le laboratoire déménagea à Léopoldville, sous la direction de Van Campenhout. Un siège plus logique, car cette implantation sur la rive sud du fleuve Congo était en plein développement. Il s’agissait du dernier port navigable avant les Chutes Livingstone, et la connexion avec l’hinterland par le chemin de fer avait été établie. Cela faisait de la petite ville un comptoir commercial cruciale et un nœud de communications avec l’intérieur des terres. Le laboratoire fut donc transféré pour de bon dans un bâtiment en 1899 (ou dans la décennie qui suivit). Avec sa façade de pierres blanches, son jardin soigné sur le devant et plusieurs locaux bien éclairés, l’ensemble ne manquait pas d’élégance. Tout comme son prédécesseur, [[Van Campenhout, Jean-Emile|Jean-Émile Van Campenhout]] faisait de la recherche, mais il travaillait aussi avec les équipes de l’hôpital et prenait des notes sur le climat. Lui aussi dut être rapatrié au cours de l’été de l’année suivante, pour des raisons de santé. Il coucha sur papier ses découvertes scientifiques, dans la publication : ''Rapport sur les travaux de la mission médicale au Congo, pendant les années 1899 et 1900 à Boma et à Léopoldville'', 1901 (en collaboration avec Dryepondt). Van Campenhout fut immédiatement remplacé par [[Broden, Alphonse (1875-1929)|Alphonse Broden]]. Celui-ci étudia surtout la malaria et l'hemogoblinurie. Il se pencha aussi sur la maladie du sommeil. Le parasite de la maladie du sommeil était alors encore inconnu. Tout comme ses prédécesseurs, la recherche n'était pour lui qu'une mission parmi d'autres. |
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<br/>Le laboratoire avait aussi des échanges fructueux avec les lazarets. Dans ces maisons de quarantaine, on enfermait les noirs qui présentaient des symptômes de la maladie du sommeil, afin d'éviter toute contagion. Ils y étaient traités, ou attendaient simplement la fin de leurs souffrances. À l’origine, ces établissements, surnommés « camps de ségrégation », étaient entourés de fil barbelé, pour empêcher les tentatives d’évasion ; mais suite aux nombreuses rébellions et aux évasions, l’efficacité de ces structures fut remise en question. Les camps de quarantaine firent ensuite progressivement place aux villages-lazarets, des établissements ouvertes bâtis comme des villages indigènes. Les laboratoires avaient pour tâche, en collaboration avec les médecins des lazarets, de surveiller l’évolution des symptômes de la maladie chez les résidents des camps. | <br/>Le laboratoire avait aussi des échanges fructueux avec les lazarets. Dans ces maisons de quarantaine, on enfermait les noirs qui présentaient des symptômes de la maladie du sommeil, afin d'éviter toute contagion. Ils y étaient traités, ou attendaient simplement la fin de leurs souffrances. À l’origine, ces établissements, surnommés « camps de ségrégation », étaient entourés de fil barbelé, pour empêcher les tentatives d’évasion ; mais suite aux nombreuses rébellions et aux évasions, l’efficacité de ces structures fut remise en question. Les camps de quarantaine firent ensuite progressivement place aux villages-lazarets, des établissements ouvertes bâtis comme des villages indigènes. Les laboratoires avaient pour tâche, en collaboration avec les médecins des lazarets, de surveiller l’évolution des symptômes de la maladie chez les résidents des camps. | ||
− | <br/> L’Institut de Médecine tropicale Princesse Astrid continua à exister après l’Indépendance. | + | <br/>Après la Seconde Guerre Mondiale, une séparation eut lieu dans le laboratoire entre les recherches consacrées à la maladie du sommeil (avec la création du Bureau Permanent Inter-Africain de la Tsé-Tsé et de la Trypanosomiase), celles consacrées à l'entérobactériologie et celles consacrées à la sous-nutrition. Le laboratoire devint aussi le plus important centre de production de vaccins de la colonie. L’Institut de Médecine tropicale Princesse Astrid continua à exister après l’Indépendance. |
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Revision as of 17:10, 20 December 2018
Institution de recherche sur les maladies bactériennes tropicales, fondée en 1894 à Boma, Congo (alors État Indépendant du Congo) et refondée à partir de 1899 à Kinshasa (Léopoldville).
Le laboratoire fut ensuite renommé Institut de Médecine tropicale Princesse Astrid. Aujourd'hui connue comme laboratoire de l'Hôpital Général de Kinshasa.
Historique
Faux départ sous Léopold II
Laboratoire de bactériologie de l’État indépendant du Congo, vers ou avant 1905. Source: Mouvement scientifique, vol 2. |
Le laboratoire bactériologique de Léopoldville avait été créé dans le cadre de la politique d’occupation de Léopold II. Le régime colonial considérait en effet l’étude des maladies tropicales comme nécessaire pour pousser la colonisation plus avant. Il était presque impossible de s’enfoncer davantage dans les terres, à cause des foyers de contagion. Pour l’occupant, la maladie et la mort étaient tapies derrière chaque buisson, dans chaque flaque d’eau. La malaria était un des maux les plus redoutés, mais le pian, la dysenterie, la variole, la grippe, la fièvre typhoïde, la diphtérie, les infections par des vers et les empoisonnements par morsure de serpents survenaient aussi régulièrement. Les symptômes étaient souvent terribles, et conduisaient presque toujours à la mort. En outre, il y avait les moustiques et les mouches exotiques, souvent d’une taille sournoisement négligeable, mais extrêmement dangereux lorsqu’ils transportaient des microbes[1].
Une maladie particulièrement cruelle était la maladie du sommeil, transmise par la mouche tsé-tsé. Après des épisodes de fièvres, d’épuisement, d’épilepsie, de confusion, elle entraînait presque toujours la mort. La mouche infectée, qui à l’origine vivait dans des zones isolées par leur environnement naturel ou délaissées par les indigènes, se répandit à partir de la fin du XIXe siècle le long des rives du fleuve Congo, dans le sillage et à l'insu des marchands, missionnaires, fonctionnaires et explorateurs coloniaux. De même, elle pénétra l’intérieur du pays grâce aux voies de chemin de fer et au transport routier. La rupture des barrières sanitaires écologiques, respectées par les indigènes, en conséquence de l’augmentation de la mobilité, des déplacements forcés de population, des corvées de portage et des constructions irréfléchies de comptoirs coloniaux en plein milieu des zones infectieuses, déclencha en 1899 une première vague d’épidémie qui répandit la mort parmi les Congolais et les occupants européens. Dans le bassin humide du Bas-Congo, la mortalité causée par la maladie du sommeil atteint même un taux de 85%. L’épidémie causa la mort de huit millions de personnes dans cette zone. À l’époque de l’État Indépendant du Congo, à peine deux Européens sur trois survivaient à l’aventure coloniale.
En 1894, un laboratoire bactériologique fut donc fondé dans la capitale, Boma, avec le soutien royal. Les professeurs d’université Joseph Denys et Charles Firket accordèrent leur soutien au projet. Deux assistants de Denys, dont Henri De Marbaix, furent désignés pour régler les aspects pratiques de la mise en place. L’institut n’eut cependant pas beaucoup de succès. De Marbaix arriva en 1894 à Boma, apportant son savoir et son expérience. Il s’était formé grâce à des séjours d’études en Inde et aux États-Unis, et grâce à des stages auprès du célèbre physiologue Hoppe-Seyler à Strasbourg et à l’Institut Pasteur de Paris. Deux ans plus tard, il était atteint par une maladie et décédait, peu après son rapatriement. Il ne parvint pas à mettre par écrit ses observations. Il fallut attendre trois années avec qu'un nouveau projet, sous l'égide de la Société Belge d'Études coloniales, ne redonne vie au laboratoire. Le successeur de De Marbaix, Jean-Émile Van Campenhout n’arriva en 1899. Il avait préalablement approfondi ses connaissances par des formations, notamment en matière de pathologie de la malaria.
La même année, le laboratoire déménagea à Léopoldville, sous la direction de Van Campenhout. Un siège plus logique, car cette implantation sur la rive sud du fleuve Congo était en plein développement. Il s’agissait du dernier port navigable avant les Chutes Livingstone, et la connexion avec l’hinterland par le chemin de fer avait été établie. Cela faisait de la petite ville un comptoir commercial cruciale et un nœud de communications avec l’intérieur des terres. Le laboratoire fut donc transféré pour de bon dans un bâtiment en 1899 (ou dans la décennie qui suivit). Avec sa façade de pierres blanches, son jardin soigné sur le devant et plusieurs locaux bien éclairés, l’ensemble ne manquait pas d’élégance. Tout comme son prédécesseur, Jean-Émile Van Campenhout faisait de la recherche, mais il travaillait aussi avec les équipes de l’hôpital et prenait des notes sur le climat. Lui aussi dut être rapatrié au cours de l’été de l’année suivante, pour des raisons de santé. Il coucha sur papier ses découvertes scientifiques, dans la publication : Rapport sur les travaux de la mission médicale au Congo, pendant les années 1899 et 1900 à Boma et à Léopoldville, 1901 (en collaboration avec Dryepondt). Van Campenhout fut immédiatement remplacé par Alphonse Broden. Celui-ci étudia surtout la malaria et l'hemogoblinurie. Il se pencha aussi sur la maladie du sommeil. Le parasite de la maladie du sommeil était alors encore inconnu. Tout comme ses prédécesseurs, la recherche n'était pour lui qu'une mission parmi d'autres.
Le laboratoire de Léopoldville était de loin un des plus beaux laboratoires bactériologiques au Congo (vers 1932). |
Salle pour les dissections bactériologiques (vers 1932). |
Nouveau départ au sein de l’infrastructure sanitaire belge
Dans le but d’améliorer l’approvisionnement en main-d’œuvre qualifiée, Léopold II fit construire un Institut de Médecine Tropicale à Bruxelles, en 1906. Cet institut effectuerait des recherches et dispenserait l’enseignement pour les médecins et les infirmiers qui se destinaient à une carrière dans l’État Indépendant. Trop tard, cependant : deux années plus tard, c’était la fin de la politique sanitaire de Léopold II, avec la reprise de la colonie par l’État belge. Entretemps, l’intégralité du territoire congolais avait été infectée par la maladie du sommeil, et il était devenu impossible aux résidents blancs de rester en poste. La constante rotation parmi les fonctionnaires rendait la mise en place d’un appareil colonial stable et moderne particulièrement difficile pour les autorités belges. Pour le colonisateur, l’assainissement du Congo devenait une priorité.
La mise en place d’une infrastructure médicale et d’une administration sanitaire donnèrent au laboratoire bactériologique de Léopoldville une nouvelle vie. Sa tâche principale consistait à présent à soutenir les institutions médicales locales et les médecins en province. Le laboratoire les assistait pour l’établissement de leurs diagnostics et pronostics cliniques, en examinant les tissus sanguins, du sang ou de la sueur de patients. En outre, il effectuait des analyses bactériologiques et chimiques de l’eau (jusqu’en 1930) et était responsable de la production de vaccins et de sérums. Il est possible qu’il se chargeât aussi de la surveillance de l’hygiène dans les établissements scolaires avoisinants, dans les années 30.[2] L’institut de Léopoldville collabora toujours davantage avec les institutions-sœurs situées dans les autres chefs-lieux provinciaux, en particuliers les laboratoires bactériologiques d’Élisabethville, Coquilhatville et Stanleyville (qui deviendra plus tard un Institut Pasteur). Ces différentes institutions se répartissaient les tâches et les compétences sur le territoire congolais.
Une deuxième fonction importante du laboratoire bactériologique était le contrôle régional du « système de passeports », qui fut mis en place en 1910 dans le cadre de la lutte contre la maladie du sommeil. On obligea les porteurs, facteurs, soldats, employés et autres voyageurs, indigènes et européens qui traversaient les frontières des provinces à porter un passeport médical. Elle garantissait le bon état de santé de son propriétaire. Le passeport devait être présenté à chaque poste de contrôle, souvent situé sur des points de traversée des rivières ou sur les grandes routes. Le titulaire du passeport devait de surcroît passer un contrôle physique, et un échantillon de liquide lymphatique était parfois envoyé au laboratoire.[3]
Une troisième mission était la recherche scientifique sur les maladies inconnues et sur les insectes vecteurs. L’équipe scientifique du laboratoire de Léopoldville se consacrait depuis sa fondation plus particulièrement à la maladie du sommeil. Dans les années qui suivirent l’annexion de la colonie, le statut de l’Institut en tant que centre d’expertise sur cette maladie fut confirmée par les directeurs successifs. Ceux-ci - Alphonse Broden, Jérôme Rodhain et Albert Dubois – étaient tous de jeunes diplômés lorsqu’ils arrivèrent au laboratoire de Léopoldville. Ils se bâtirent une haute réputation par-delà les frontières au cours de leur séjour sous les tropiques, grâce à de nombreuses publications, aussi bien en Belgique – entre autres pour la Société belge d’Etudes Coloniales ou dans les annales de la Société belge de Médecine Tropicale fondée Broden – qu’à l’international.
Sous le directorat de ces médecins, l’Institut Léopold, en partenariat avec (entre autres) l’hôpital de quarantaine situé à proximité, mena à partir des années 1910 des expériences thérapeutiques sur ses patients, utilisant l’arsacétine et l’atoxyl. Des expéditions dans l’arrière-pays permirent de rassembler des échantillons utiles à la recherche sur la maladie du sommeil. L’institut apportait aussi son expertise scientifique à la politique publique de la ‘Mission maladie du sommeil’. Au fil de l’Entre-Deux-Guerres, la recherche sur la malaria, les infections parasitaires de la catégorie des filarioses comme l’ankylostome et l’éléphantiasis, ainsi que sur les maladies typhoïques (rickettsioses) avaient été ajoutées par les pouvoirs publics au programme de recherche de Léopoldville.
Développements ultérieurs
Devant et derrière du nouvel institut. |
À la fin des années 30, une « zone médicale » avait été instituée à la périphérie de Léopoldville, dans la partie de la ville habitée par les autochtones – comme c'était le cas dans la plupart des grandes villes du Congo. Cette zone regroupait l’hôpital européen, l’‘Hôpital des noirs’, l’École des Assistants Médicaux Indigènes, le village de quarantaine pour les Congolais atteints par la maladie du sommeil, et des bâtiments pour le personnel infirmier. En 1936, sous le directorat de P. Brutsaert, le laboratoire déménagea lui aussi vers ce site. Il reçut un nouveau nom : Institut de médecine tropicale Princesse Astrid. Il collabora activement avec les autres institutions présentes dans la zone médicale. L’hôpital fournissait le laboratoire en échantillons médicaux et en cadavres, et faisait appel au personnel de laboratoire pour établir des diagnostics. Les élèves de l’école d’infirmerie visitaient aussi régulièrement ses locaux dans le cadre de leur formation.
Le laboratoire avait aussi des échanges fructueux avec les lazarets. Dans ces maisons de quarantaine, on enfermait les noirs qui présentaient des symptômes de la maladie du sommeil, afin d'éviter toute contagion. Ils y étaient traités, ou attendaient simplement la fin de leurs souffrances. À l’origine, ces établissements, surnommés « camps de ségrégation », étaient entourés de fil barbelé, pour empêcher les tentatives d’évasion ; mais suite aux nombreuses rébellions et aux évasions, l’efficacité de ces structures fut remise en question. Les camps de quarantaine firent ensuite progressivement place aux villages-lazarets, des établissements ouvertes bâtis comme des villages indigènes. Les laboratoires avaient pour tâche, en collaboration avec les médecins des lazarets, de surveiller l’évolution des symptômes de la maladie chez les résidents des camps.
Après la Seconde Guerre Mondiale, une séparation eut lieu dans le laboratoire entre les recherches consacrées à la maladie du sommeil (avec la création du Bureau Permanent Inter-Africain de la Tsé-Tsé et de la Trypanosomiase), celles consacrées à l'entérobactériologie et celles consacrées à la sous-nutrition. Le laboratoire devint aussi le plus important centre de production de vaccins de la colonie. L’Institut de Médecine tropicale Princesse Astrid continua à exister après l’Indépendance.
Directeurs vóór de dekolonisatie
- Henri De Marbaix
- Jean-Emile Van Campenhout
- Alphonse Broden
- Jérôme Rodhain
- Mouchet
- Albert Dubois
- Jan-Frans Van den Branden
- Van Hoof
- P. Brutsaert
- Neujean
- Evens
- E. Van Oye
Bibliographie
Sources
- Archives africaines, Fonds Rapports, (104) Équateur. Rapport Labo bactériologique: Rapport Laboratoire Coquilhatville 1933 en 1934
- Archives africaines, Fonds Hygiène, 982 (4475): Laboratoire d’Élisabethville 1948- ‘52
- Archives africaines, Fonds Hygiène, 984 (4470): Laboratoire de Stanleyville 1921, 27-28, 50-57. Sous-dossier: création d’un institut pasteur au Congo 1927-2, Brochure dactylographiée ‘Dénombrement et classification des établissements du service médical du gouvernement de la colonie’, s.d. (vers 1947)
- Archives africaines, Fonds RACBGG, (500) Rapport général des laboratoires 1927 en Lanza, ‘Stanleyville, une ville cosmopolite’, 100.
- Archives africaines, Fonds GG, 15128: Missionnaires au laboratoire de Léopoldville, 1910: Rapport Commission pour la maladie du sommeil, 1910.
- Archives africaines, Fonds RA/MED-22: Rapports Orientale (Stanleyville) labo méd 1953, Rapport Léo 1957.
Publications
- Donny, La remise à l’Etat belge du Laboratoire de Bactériologie de Léopoldville, 1910.
- Richard, "Un institut Pasteur à Stanleyville" in: Bruxelles-Médical. Revue Hebdomadaire des sciences médicales et chirurgicales, 8 (1927, 27 november), n°4.
- De geneeskundige loopbanen in Belgisch Congo, Bruxelles, 1949.
- Headrick, Daniel , The tools of empire. Technology and European imperialism in the nineteenth Century, Oxford, 1981.
- Lyons, Maryinez, The Colonial Disease: A Social History of Sleeping Sickness in Northern Zaire 1900-1940, Cambridge, 1992.
- Eynikel, Hilde, Onze Kongo, Leuven, 1997.
- Couttenier, Maarten, Congo tentoongesteld: Een geschiedenis van de Belgische antropologie en het museum van Tervuren (1882-1925), Leuven, 2005
- Baetens, Roland (red.), Een brug tussen twee werelden; het Prins Leopold Instituut voor Tropische Geneeskunde Antwerpen 100 jaar, publication en ligne, 2006, consultée le 12/04/2018.
- Diser, Lyvia, Ambtenaren in witte jas. Laboratoriumwetenschap in het Belgisch overheidsbeleid (1870-1940), Thèse inédite, Katholieke Universiteit Leuven, departement Geschiedenis, 2013
- "Laboratories médicaux et d’hygiène", op: Site web de l’Institut de Médecine tropicale, consulté le 12/04/2018.
Notes
- ↑ Les dépressions et les psychoses faisaient partie des affections moins visibles – mais de ce fait, non moins dangereuses - dont les colons étaient victimes.
- ↑ Tout comme le faisait le laboratoire de Coquilhatville.
- ↑ Dans certains points d’observation, on trouvait un microscope et un employé capable de s’en servir.