Centre Scientifique et Médical de l'Université libre de Bruxelles en Afrique Centrale
Fondation scientifique et médicale de l’Université libre de Bruxelles créée en 1938. D’abord interdisciplinaire et centré sur la colonie du Congo belge, le Centre diversifia ses terrains d’actions après l’indépendance et se concentra sur sa mission médicale.
Abréviation : CEMUBAC
Création
Sanatorium de Shabunda. Source: « La CEMUBAC en Afrique centrale », p. 948. |
En 1930, le baron Jacques Cassel, grand banquier bruxellois, passa de vie à trépas. Il léguait une partie de sa fortune à l’Université libre de Bruxelles pour la création d’une « Fondation Cassel », destinée à financer des missions scientifiques dans la colonie belge pour des chercheurs de cette université. Cette fondation était placée sous le contrôle de ses héritiers, et présidée par Herbert Speyer, sénateur libéral, membre du Conseil Colonial, professeur à l’Université de Bruxelles et principal promoteur des thématiques coloniales à l’ULB. La Fondation Cassel finança notamment l’enquête sociologique du professeur Georges Smets et l’exploration scientifique du Ruwenzori par le professeur Lucien Hauman.
Le CEMUBAC elle-même fut fondée le 23 mars 1938, grâce aux fonds de la Fondation Cassel, à l’initiative du professeur Albert Dustin (qui en devint le premier président) et d’autres professeurs de l’Université libre. Sa mission était de fournir une médecine de terrain aux populations congolaises et de lutter contre les épidémies. Dès 1939, le Centre s’implanta dans la vallée du Lomani, à l’invitation de la Compagnie de Lomani et du Lualaba. Cette société pourvut largement le Centre en moyens financiers et lui confia des terres sur lesquelles les scientifiques bruxellois implantèrent deux dispensaires, un hôpital et des laboratoires. Ceux-ci servaient aussi de point de chute pour les chercheurs de l’ULB explorant l’Afrique Centrale. À l’instar de la FULREAC et de Ganda-Congo, il ne s’agissait que d’une « filiale » d’une université belge.
Après l’éclipse de la Seconde Guerre Mondiale, le Centre se concentra sur la lutte contre la tuberculose. Le docteur Chardome parcourut notamment le Maniema (Nord-Kivu) et le Ruanda en camion radio-photographique pour dépister cette maladie, et trois sanatoria antituberculeux furent ouverts à Rwamangana (Ruanda), à Shabunda et à Kasongo (Maniema).
D’août à octobre 1957, les biologistes bruxellois Paul Brien, Max Poll et Jean Bouillon séjournèrent au Stanley Pool pour y étudier la faune et la flore des marais en amont de Léopoldville, grâce aux susbides de la CEMUBAC. Source : Brien, Paul, Poll, Max et Bouillon, Jean, « Éthologie de la reproduction du Protopterus dolloi Boulenger », in Résultats scientifiques des missions zoologiques au Stanley Pool subsidiées par le Cemubac, 1-74. |
Les sections
En 1950, la CEMUBAC prit un nouveau départ : refondée en droit Congolais, elle cessa de se consacrer exclusivement à la médecine se subdivisa en plusieurs « sections » :
- Section de Psychologie : professeur André Ombredane
- Section des Sciences naturelles : Elisabeth De Naeyer pour la géologie, P. Duvigneaud pour la botanique, Paul Brien pour la zoologie
- Enseignement : professeur Sylvain De Coster, chargé d’étudier les formes d’enseignement les plus adaptées au public africain
- Géographie : professeurs Gourou, De Smet et Nicolaï
- Sciences Appliquées : professeur Yvan de Magnée, en collaboration avec les sociétés minières congolaises
- Section économique et sociale : professeurs Ghilain, Doucy et Janne
- Section interdisciplinaire : professeurs Gourou et Ghilain, ensuite remplacés par Henri Janne et R. De Smet, lequels menèrent une vaste enquête sociale entre 1958 et 1961 à travers la Province Orientale.
Indépendance
L’indépendance conduisit à la nationalisation des hôpitaux et sanatoria. Le Centre fut remplacé au Congo par un établissement d’utilité public. En Belgique, le CEMUBAC céda la place à un "Centre Scientifique et Médical de l’ULB pour ses Activités de Coopération". Celui-ci lança une nouvelle mission médicale au Kivu en 1963, conduite par les professeurs Ermans et Dumont. Les scientifiques utilisèrent le Centre de Lwiro de l’IRSAC comme base arrière et y établirent quatre hôpitaux, une unité d’hospitalisation pour enfants, des laboratoires, et des dispensaires ruraux. Ils y lancèrent aussi une campagne contre le goître (au moyen d’injections d’huile iodée). Le succès de cette campagne permit au Centre Scientifique et Médical de l’ULB pour ses Activités de Coopération d’exporter ses résultats dans d’autres pays du Tiers-Monde comme l’Algérie, le Népal, le Vietnam, l’Équateur…
Dans les années 80, le Centre multiplia les établissements sanitaires au Nord-Kivu et y lutta contre la malnutrition et le SIDA. À partir de 1995, ces actions furent étendues à d’autres pays africains (Sénégal, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Rwanda, Burundi) et le Centre put bénéficier des subsides de la Banque Mondiale et de l’Union européenne. Enfin, en 2014, le CEMUBAC fusionna avec l’ASBL "Service Laïque de Coopération au Développement" (SLCD) et le "Service d’Information et de Formation" (SDIF) pour former "ULB-Coopération", l’ONG officielle de l’Université libre de Bruxelles pour l'aide aux pays en voie de développement.
Bibliographie
- « La CEMUBAC en Afrique centrale » in La Revue coloniale belge, Bruxelles, n°173, 15 décembre 1952, p. 948.
- Résultats scientifiques des missions zoologiques au Stanley Pool subsidiées par le Cemubac (Université libre de Bruxelles) et le Musée Royal du Congo (1957-1958), Tervuren, Musée Royal du Congo, 1959 (coll. « Annales du Musée Royal du Congo belge, Sciences Zoologiques, v. 71).
- Beernaerts, J.-P., « Historique du CEMUBAC » in Centre scientifique et médical de l’Université libre de Bruxelles pour ses activités de Coopération, Actes du Cinquantenaire du CEMUBAC¸ Bruxelles, ULB, 1988, p. 17-28.
- Grogna, N., L’action de l’Université de Liège au Katanga, mémoire de licence en histoire, inédit, Université de Liège, année académique 1986-1987.
- Dutrieue, A.-M., « Cassel Jacques » in Van Hentenrijk, K. et al., Dictionnaire des patrons en Belgique. Les hommes, les entreprises, les réseaux, Bruxelles, De Boeck & Larcier, 1996, p. 92-93.
- Poncelet, M., L’invention des sciences coloniales belges, Paris, 2008.
- Géoris, M., « Speyer Herbert » in NBN, t. X, Bruxelles, Académie Royale de Belgique, 2010, p. 332-333.
- Site web d’ULB-Coopération, consulté le 17 mars 2019.