Difference between revisions of "Fonds National de la Recherche Scientifique"
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Au cours des années qui suivirent la Première Guerre mondiale, une vague d’optimisme scientifique déferla sur la société belge. La guerre chimique n’avait causé aucun tort à la science. Au contraire : la science était considérée comme l’instrument qui avait permis de gagner la guerre et qui allait permettre de reconstruire le pays, de l’améliorer et de le moderniser. C’est surtout l’élite financière et industrielle qui se tourna vers la science. Elle était convaincue que la science pouvait créer la prospérité parce qu’on pouvait tirer parti de la connaissance qu’elle engendrait pour en faire bénéficier l’innovation industrielle. Ce qui avait été le cas jusqu’alors, en exceptant la Fabrique Nationale de Herstal, demeurée à l’écart de la scientifisation du secteur industriel belge.<ref>Dans les pays voisins, la scientifisation avait bien fait son apparition. Des exemples célèbres : Electric et AT&T aux États-Unis et, en Allemagne, Kodak, Siemens et AEG.</ref> Il ne fallait cependant pas s’attendre à ce que ce soit l’industrie même qui donne l’élan à une dynamique de recherche. | Au cours des années qui suivirent la Première Guerre mondiale, une vague d’optimisme scientifique déferla sur la société belge. La guerre chimique n’avait causé aucun tort à la science. Au contraire : la science était considérée comme l’instrument qui avait permis de gagner la guerre et qui allait permettre de reconstruire le pays, de l’améliorer et de le moderniser. C’est surtout l’élite financière et industrielle qui se tourna vers la science. Elle était convaincue que la science pouvait créer la prospérité parce qu’on pouvait tirer parti de la connaissance qu’elle engendrait pour en faire bénéficier l’innovation industrielle. Ce qui avait été le cas jusqu’alors, en exceptant la Fabrique Nationale de Herstal, demeurée à l’écart de la scientifisation du secteur industriel belge.<ref>Dans les pays voisins, la scientifisation avait bien fait son apparition. Des exemples célèbres : Electric et AT&T aux États-Unis et, en Allemagne, Kodak, Siemens et AEG.</ref> Il ne fallait cependant pas s’attendre à ce que ce soit l’industrie même qui donne l’élan à une dynamique de recherche. | ||
− | <br/>Le besoin qu’éprouvaient les industriels de voir la science faire son entrée dans le monde académique coïncidait avec le besoin croissant de moyens financiers éprouvé par les institutions universitaires belges. Avant même le début de la guerre, les investissements dans l’infrastructure scientifique de l’enseignement supérieur avaient été limités. Au lendemain de la guerre, toutes les universités, surtout les institutions libres, furent privées de l’infrastructure matérielle et des moyens nécessaires pour financer la recherche à un haut niveau, surtout la nouvelle recherche expérimentale. Entre le monde académique et le monde industriel, on vit naître une collaboration qui atteignit son sommet en 1928 lorsque fut créée un véritable fonds d’investissement pour la recherche fondamentale : le Fonds National pour la Recherche Scientifique (FNRS). À la base de cette initiative, on trouvait les membres de la [[Fondation Universitaire]], créée en 1920. L’élite belge marchait ainsi sur la trace d’autres pays où le secteur privé pratiquait depuis longtemps un mécénat scientifique.<ref> Des institutions semblables, des entreprises sous contrôle gouvernemental ou privées et | + | <br/>Le besoin qu’éprouvaient les industriels de voir la science faire son entrée dans le monde académique coïncidait avec le besoin croissant de moyens financiers éprouvé par les institutions universitaires belges. Avant même le début de la guerre, les investissements dans l’infrastructure scientifique de l’enseignement supérieur avaient été limités. Au lendemain de la guerre, toutes les universités, surtout les institutions libres, furent privées de l’infrastructure matérielle et des moyens nécessaires pour financer la recherche à un haut niveau, surtout la nouvelle recherche expérimentale. Entre le monde académique et le monde industriel, on vit naître une collaboration qui atteignit son sommet en 1928 lorsque fut créée un véritable fonds d’investissement pour la recherche fondamentale : le Fonds National pour la Recherche Scientifique (FNRS). À la base de cette initiative, on trouvait les membres de la [[Fondation Universitaire]], créée en 1920. L’élite belge marchait ainsi sur la trace d’autres pays où le secteur privé pratiquait depuis longtemps un mécénat scientifique.<ref> Des institutions semblables, des entreprises sous contrôle gouvernemental ou privées et des bureaux-conseils pour la promotion de la science, virent le jour dans toute l’Europe d’après-guerre. En 1915, par exemple, le gouvernement britannique mit sur pied un ''Advisory Council for Scientific Research'' ; les États-Unis suivirent avec un ''National Research Council'' en 1916 (soutenu et co-administré par le ''Carnegie Institute of Washington'' et la ''Rockefeller Foundation'') et, en France, l’Académie des Sciences devint responsable de l’organisation de la recherche expérimentale, y compris ses applications à l’industrie.</ref> |
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+ | La fondation du FNRS fut soutenue par l’avènement d’une haute conjoncture économique à partir de la fin des années 1920, mais aussi par la personnalité remarquable du roi Albert I, qui s’érigea en parrain du mouvement pour l’investissement privé dans la science fondamentale. En octobre 1927, au cours de la célébration du jubilé de l’usine Cockerill à Seraing, le souverain prononça une allocution très remarquée, signal du départ symbolique du mécénat scientifique industriel. Devant son public, qui ne comptait que des représentants de l’industrie et de la banque, il souligna les difficultés que connaissaient les institutions de la recherche et l’impuissance du gouvernement, déjà très pris. Le roi déclara que la science fondamentale - la « science pure » - telle qu’elle était pratiquée dans le monde académique, était cependant la condition absolue de la naissance de la science appliquée. | ||
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+ | <br/>Deux mois plus tard, le 28 novembre 1927, le protecteur éclairé réitéra son appel au Palais des Académies. La séance solennelle était présidée par [[Francqui, Émile Lucien Joseph (1863-1935)|Emile Francqui]] en tant que président de la [[Fondation Universitaire]]. Sur le podium étaient réunis des professeurs d’université, des académiciens et les directeurs de grandes institutions scientifiques du pays. On pouvait voir dans la salle des délégués du gouvernement, des ministres et la crème du monde bancaire et industriel belge, notamment le philanthrope et mécène scientifique Armand Solvay. | ||
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+ | <br/>« Créatrice de richesse, la science est pauvre en elle-même. Il faut venir à son aide. » Une fois de plus, les paroles de sagesse du souverain firent impression. Trois mois plus tard, un comité de propagande, spécialement mis sur pied et dirigé par [[Francqui, Émile Lucien Joseph (1863-1935)|Francqui]], avait déjà réuni cent millions de francs, notamment des dons de banques et d’entreprises en vue, des dons plus ou moins importants de particuliers et une somme de 25 millions provenant de la famille Solvay. Un mois plus tard, le 27 avril 1928, le Fonds National de la Recherche scientifique/Nationaal Fonds voor Wetenschappelijk Onderzoek voyait le jour. | ||
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+ | Le fonds nouvellement instauré sous la présidence de [[Francqui, Émile Lucien Joseph (1863-1935)| Francqui]]se composait d’un conseil d’administration de 26 membres issus de milieux financiers et académiques, notamment les recteurs de toutes les institutions d’enseignement supérieur. Il comportait également un bureau et un Comité des Finances. Dans ses statuts, le FNRS s’engageait à soutenir et à stimuler la recherche scientifique en Belgique. Ce faisant, il reprenait en partie le flambeau de la [[Fondation Universitaire]]. Le FNRS se fixait pour objectif de procurer aux scientifiques individuels des moyens financiers et logistiques en leur accordant des mandats, des crédits pour les voyages et les congrès et en mettant à leur disposition des instruments scientifiques. | ||
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+ | <br/>Les statuts du nouveau fonds soulignaient le caractère apolitique, philosophiquement et linguistiquement neutre de l’association. Le premier conseil d’administration fut une émanation de ce début. Ses vingt-six membres représentaient d’une manière équilibrée les universités, les établissements d’enseignement supérieur, les académies, les secteurs industriel et financier. L’État belge n’était pas représenté. Dès lors, la composition de la direction du FNRS fut, à l’image de sa fondation, une affaire privée entre le souverain, des patrons de l’industrie et du secteur bancaire et un certain nombre d’académiciens en vue. Conçu de cette façon, le fonds formait un cadre réglementé au sein duquel de savants académiciens et des dirigeants des secteur industriel et du secteur bancaire pouvaient se rencontrer. En 1930, le gouvernement vota une proposition de loi qui exonérait de l’impôt les dons accordés au FNRS, s’alignant ainsi sur la réglementation américaine sur les donations. | ||
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+ | <br/>Les membres du conseil d’administration stipulèrent que le fonds se concentrerait sur la science fondamentale et la science pure. Au fil du temps, cette ligne politique créa une frustration chez certains industriels qui avaient imaginé que l’approche du FNRS serait, au début, plus pragmatique. C’est pourquoi, en 1928, en collaboration avec la Commission mixte science-industrie, le FNRS fonda un [[Bureau spécial Sciences-Industrie]] pour subventionner la recherche industrielle. Le bureau reçut une petite partie de ses fonds du FNRS. | ||
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+ | Au cours de la Seconde Guerre mondiale, le FNRS resta à son poste, même avec des moyens réduits. En 1943, il fonda un service d’urgence universitaire pour faire face au manque croissant de ressources qu’éprouvaient les chercheurs. Il y eut par ailleurs un accroissement du nombre de mandats d’échange avec l’Allemagne. Comme le conseil d’administration devait être assisté par deux membres de la puissance occupante, les réunions se raréfièrent au maximum. | ||
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+ | <br/>L’année 1947 vit la création de l’Institut interuniversitaire de physique nucléaire, baptisé à partir de 1951 [[Institut interuniversitaire des Sciences nucléaires]]. Il s’agissait d’une véritable association dirigée par le directeur du FNRS [[Willems, Jean (1895-1970)|Jean Willems]] et par [[Hemptinne, Marc Ferdinand Léon, comte de (1902-1986)|Marc de Hemptinne]]. Cette institution soutenait la recherche fondamentale mais aussi les recherches axées davantage sur l’application dans le domaine des sciences nucléaires. En 1958, le FNRS, avec le ministère de la Santé publique, créa le [[Fonds de la Recherche Scientifique Médicale]] (FRSM). Ce fonds constituait une partie distincte du FNRS : il était responsable de la distribution des fonds aux projets en sciences médicales où l’on souffrait d’une grave pénurie de ressources. En 1965, enfin, fut créé le [[Fonds de la Recherche Fondamentale Collective]]. Ce fonds était chargé de financer des projets de recherche dans tous les domaines scientifiques, à l’exception des sciences médicales et nucléaires. | ||
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+ | <br/>Dans les années 1960, les tensions communautaires en Belgique, en particulier dans les universités de Louvain et de Bruxelles, eurent un grand impact sur la structure du FNRS qui était considéré comme un bastion majoritairement francophone. Les critiques connaissent le retard flamand ressenti dans la recherche scientifique au NFWO. Par conséquent, en 1970, le budget du fonds et les subventions du gouvernement furent répartis par communauté linguistique. Le ton était donné en vue d’une nouvelle division de la structure du Fonds. En 1992, de nouveaux statuts virent le jour qui divisaient le fonds en deux institutions autonomes de facto, une néerlandophone et une francophone. En 2005 eut lieu la scission définitive en deux instituts distincts : le FWO-Vlaanderen et le F.R.S.-FNRS. | ||
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+ | Dès sa fondation, le FNRS joua un rôle important dans l’attribution des mandats pour la recherche doctorale. La recherche individuelle, comme celle des prix Nobel [[Heymans, Corneille Jean François (1892-1968)|Corneel Heymans]] et [[Bordet, Jules Jean Baptiste Vincent (1870-1961)|Jules Bordet]], fut également soutenue grâce à un subside étalé parfois sur des dizaines d’années tandis que [[Paul Bordet]] recevait un subside bien défini pour sa recherche sur un sérum sanguin. Suite à la démocratisation de l’enseignement supérieur suivie par la loi sur l’expansion universitaire de 1965, le nombre de demandes de mandats faites surtout par des étudiants doctorants monta rapidement. | ||
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+ | <br/>Mais le FNRS se lança sans tarder dans des projets de recherche bien circonscrits, souvent spectaculaires. Au cours de l’entre-deux-guerres, le financement fut souvent attribué à des projets utiles, novateurs et pacifiques, et qui étaient susceptibles de donner à la Belgique en tant que pays sa place sur la carte, ou d’enrichir la nation. Le premier projet vit le jour en 1930. À l’époque, il fut placé sous l’autorité de l’archéologue Fernand Mayence du [[Musées royaux d'Art et d'Histoire|Musée Royal d’Art et d’Histoire]] et profita de l’appui financier du FNRS : une métropole romaine fut mise au jour en Syrie. Au cours des années suivantes, les archéologues purent compter sur le soutien financier du FNRS, notamment lors des fouilles d’Alba Fucens en Italie et d’un site préhistorique en Iran. Le [[Musées royaux d'Art et d'Histoire|musée royal du Cinquantenaire]] accueillit les découvertes. De nouveaux projets, assez prestigieux, suivirent rapidement : par exemple, parlant à l’imagination, les vols stratosphériques du professeur de physique [[Auguste Piccard]] dans son ballon, le [[FNRS-1 -Ballon stratosphérique|FNRS-1]] (1931) et les expériences du même professeur dans les fonds abyssaux à bord du tout premier bathyscaphe, le [[FNRS-2 - bathyscaphe|FNRS-2]]. Quant à la création de la station de recherche internationale du Jungfraujoch en 1931 et à l’expédition des îles de Pâques (1934), elles n’avaient aucune utilité commerciale. | ||
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+ | Mais l’exploration scientifique du massif du Ruwenzori en 1932, la recherche hydrobiologique et piscicologique du lac Tanganyika en 1946 et la construction d’un hélicoptère par Nicolas Florine (1933) en avaient bel et bien une. | ||
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+ | <br/>Après la Seconde Guerre mondiale, la « Big Science » vit le jour, exercice scientifique à l’orientation plus internationale, avec des rôles de premier plan pour les sciences de l’espace et la physique nucléaire. Le FNRS s’engagea aussi : en 1945, il créa une commission chargée de soumettre la branche scientifique de la physique nucléaire à une étude. Au cours des années 1960 et 1970, le soutien à la création et à l’équipement du nouveau Laboratoire de physique nucléaire de l’[[Université de Gand]] se renforça. En outre, les savants purent compter sur une aide pour acheter et concevoir les appareils scientifiques toujours plus grands, destinés à l’exploitation des « big data ». En 1955, le FNRS devint propriétaire d’une machine à calculer électronique géante conçue en Belgique, la toute première à y être conçue. À partir de 1950, la recherche finança le développement du microscope électronique au [[Centre d’Électromicroscopie]] | ||
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+ | |width="100"|'''L’expédition de la Grande Barrière de Corail donna à la Belgique quantité de trésors naturels de grande valeur.''' <small>Source Motty, dans [https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=13600411 Wikimedia Commons].</small> | ||
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+ | du gantois [[Gaston Vandermeersche]], du professeur d’université [[Joseph Lauweryns]] de Louvain et du professeur d’université bruxellois [[Luc Bouwens]]. Au cours des années 60, le [[Centre de Calcul digital]] de Gand reçut à plusieurs reprises des subsides du FNRS. En 1974, le FNRS participa à la création de la Fondation Européenne de la Science. Parallèlement, il y eut aussi, comme d’habitude, des projets « classiques » comme l’expédition au pôle Sud de [[Gaston de Gerlache]], l’élaboration d’une carte des îles Galapagos, l’expédition de la [[L'expédition belge vers la Grande Barrière de Corail (1967)|Grande Barrière de Corail]] sous la direction de [[Dubuisson, Marcel Georges Valère Céline (1903-1974)|Marcel Dubuisson]] et les études géomorphologiques et géochronologiques du quartaire de la [[VUB]]. | ||
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+ | <br/>À partir de 1970, après la scission en un fonds francophone et un fonds néerlandophone, les projets de recherche et les mandats se répartirent dans leur domaine linguistique propre. | ||
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+ | ===Siège=== | ||
+ | Depuis sa fondation, le NFWO (FWO-Flandre, F.R.S – FNRS) se trouve rue d’Egmont, à Bruxelles, où il occupe plusieurs bâtiments. | ||
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+ | ===Finances=== | ||
+ | Au cours des dix premières années de son existence, le NFWO a donné près de 45 millions de francs pour soutenir la science. La majeure partie des subsides a été consacrée au soutien des aspirants, des associés et des chercheurs. Jusqu’en 1947, le NFWO a pu compter à 100% sur les dons du secteur privé. Puis le gouvernement a mis à son tour la main à la poche en concédant un subside annuel royal, qui devint alors la source de revenus la plus importante. Après quelque temps, le Fonds put compter de plus en plus sur les intérêts du capital obtenu. Cette source de revenus augmenta au fil des années d’après-guerre jusqu’à devenir la plus importante tandis que, au même moment, les subsides du gouvernement répondaient au nombre croissant de demandes de mandats et de projets. Du côté francophone, le spectacle de télévision Télévie constitue depuis 1989 et jusqu’à aujourd’hui une source importante de revenus. Ici aussi, on fait appel aux dons des particuliers. | ||
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+ | ===Notes=== |
Latest revision as of 14:18, 5 December 2024
En néerlandais: Nationaal Fonds voor het Wetenschappelijk Onderzoek.
Contents
Historique
Avant-propos
Au cours des années qui suivirent la Première Guerre mondiale, une vague d’optimisme scientifique déferla sur la société belge. La guerre chimique n’avait causé aucun tort à la science. Au contraire : la science était considérée comme l’instrument qui avait permis de gagner la guerre et qui allait permettre de reconstruire le pays, de l’améliorer et de le moderniser. C’est surtout l’élite financière et industrielle qui se tourna vers la science. Elle était convaincue que la science pouvait créer la prospérité parce qu’on pouvait tirer parti de la connaissance qu’elle engendrait pour en faire bénéficier l’innovation industrielle. Ce qui avait été le cas jusqu’alors, en exceptant la Fabrique Nationale de Herstal, demeurée à l’écart de la scientifisation du secteur industriel belge.[1] Il ne fallait cependant pas s’attendre à ce que ce soit l’industrie même qui donne l’élan à une dynamique de recherche.
Le besoin qu’éprouvaient les industriels de voir la science faire son entrée dans le monde académique coïncidait avec le besoin croissant de moyens financiers éprouvé par les institutions universitaires belges. Avant même le début de la guerre, les investissements dans l’infrastructure scientifique de l’enseignement supérieur avaient été limités. Au lendemain de la guerre, toutes les universités, surtout les institutions libres, furent privées de l’infrastructure matérielle et des moyens nécessaires pour financer la recherche à un haut niveau, surtout la nouvelle recherche expérimentale. Entre le monde académique et le monde industriel, on vit naître une collaboration qui atteignit son sommet en 1928 lorsque fut créée un véritable fonds d’investissement pour la recherche fondamentale : le Fonds National pour la Recherche Scientifique (FNRS). À la base de cette initiative, on trouvait les membres de la Fondation Universitaire, créée en 1920. L’élite belge marchait ainsi sur la trace d’autres pays où le secteur privé pratiquait depuis longtemps un mécénat scientifique.[2]
Francqui était une figure de proue à la fois de la Commission for Relief in Belgium, de la Fondation Universitaire et du FNRS. |
La fondation
La fondation du FNRS fut soutenue par l’avènement d’une haute conjoncture économique à partir de la fin des années 1920, mais aussi par la personnalité remarquable du roi Albert I, qui s’érigea en parrain du mouvement pour l’investissement privé dans la science fondamentale. En octobre 1927, au cours de la célébration du jubilé de l’usine Cockerill à Seraing, le souverain prononça une allocution très remarquée, signal du départ symbolique du mécénat scientifique industriel. Devant son public, qui ne comptait que des représentants de l’industrie et de la banque, il souligna les difficultés que connaissaient les institutions de la recherche et l’impuissance du gouvernement, déjà très pris. Le roi déclara que la science fondamentale - la « science pure » - telle qu’elle était pratiquée dans le monde académique, était cependant la condition absolue de la naissance de la science appliquée.
Deux mois plus tard, le 28 novembre 1927, le protecteur éclairé réitéra son appel au Palais des Académies. La séance solennelle était présidée par Emile Francqui en tant que président de la Fondation Universitaire. Sur le podium étaient réunis des professeurs d’université, des académiciens et les directeurs de grandes institutions scientifiques du pays. On pouvait voir dans la salle des délégués du gouvernement, des ministres et la crème du monde bancaire et industriel belge, notamment le philanthrope et mécène scientifique Armand Solvay.
« Créatrice de richesse, la science est pauvre en elle-même. Il faut venir à son aide. » Une fois de plus, les paroles de sagesse du souverain firent impression. Trois mois plus tard, un comité de propagande, spécialement mis sur pied et dirigé par Francqui, avait déjà réuni cent millions de francs, notamment des dons de banques et d’entreprises en vue, des dons plus ou moins importants de particuliers et une somme de 25 millions provenant de la famille Solvay. Un mois plus tard, le 27 avril 1928, le Fonds National de la Recherche scientifique/Nationaal Fonds voor Wetenschappelijk Onderzoek voyait le jour.
Statuts et organisation
Médaille d'honneur avec profil de Jean Willems, 1970. Copyright © STAM. |
Le fonds nouvellement instauré sous la présidence de Francquise composait d’un conseil d’administration de 26 membres issus de milieux financiers et académiques, notamment les recteurs de toutes les institutions d’enseignement supérieur. Il comportait également un bureau et un Comité des Finances. Dans ses statuts, le FNRS s’engageait à soutenir et à stimuler la recherche scientifique en Belgique. Ce faisant, il reprenait en partie le flambeau de la Fondation Universitaire. Le FNRS se fixait pour objectif de procurer aux scientifiques individuels des moyens financiers et logistiques en leur accordant des mandats, des crédits pour les voyages et les congrès et en mettant à leur disposition des instruments scientifiques.
Les statuts du nouveau fonds soulignaient le caractère apolitique, philosophiquement et linguistiquement neutre de l’association. Le premier conseil d’administration fut une émanation de ce début. Ses vingt-six membres représentaient d’une manière équilibrée les universités, les établissements d’enseignement supérieur, les académies, les secteurs industriel et financier. L’État belge n’était pas représenté. Dès lors, la composition de la direction du FNRS fut, à l’image de sa fondation, une affaire privée entre le souverain, des patrons de l’industrie et du secteur bancaire et un certain nombre d’académiciens en vue. Conçu de cette façon, le fonds formait un cadre réglementé au sein duquel de savants académiciens et des dirigeants des secteur industriel et du secteur bancaire pouvaient se rencontrer. En 1930, le gouvernement vota une proposition de loi qui exonérait de l’impôt les dons accordés au FNRS, s’alignant ainsi sur la réglementation américaine sur les donations.
Les membres du conseil d’administration stipulèrent que le fonds se concentrerait sur la science fondamentale et la science pure. Au fil du temps, cette ligne politique créa une frustration chez certains industriels qui avaient imaginé que l’approche du FNRS serait, au début, plus pragmatique. C’est pourquoi, en 1928, en collaboration avec la Commission mixte science-industrie, le FNRS fonda un Bureau spécial Sciences-Industrie pour subventionner la recherche industrielle. Le bureau reçut une petite partie de ses fonds du FNRS.
Évolution
Au cours de la Seconde Guerre mondiale, le FNRS resta à son poste, même avec des moyens réduits. En 1943, il fonda un service d’urgence universitaire pour faire face au manque croissant de ressources qu’éprouvaient les chercheurs. Il y eut par ailleurs un accroissement du nombre de mandats d’échange avec l’Allemagne. Comme le conseil d’administration devait être assisté par deux membres de la puissance occupante, les réunions se raréfièrent au maximum.
L’année 1947 vit la création de l’Institut interuniversitaire de physique nucléaire, baptisé à partir de 1951 Institut interuniversitaire des Sciences nucléaires. Il s’agissait d’une véritable association dirigée par le directeur du FNRS Jean Willems et par Marc de Hemptinne. Cette institution soutenait la recherche fondamentale mais aussi les recherches axées davantage sur l’application dans le domaine des sciences nucléaires. En 1958, le FNRS, avec le ministère de la Santé publique, créa le Fonds de la Recherche Scientifique Médicale (FRSM). Ce fonds constituait une partie distincte du FNRS : il était responsable de la distribution des fonds aux projets en sciences médicales où l’on souffrait d’une grave pénurie de ressources. En 1965, enfin, fut créé le Fonds de la Recherche Fondamentale Collective. Ce fonds était chargé de financer des projets de recherche dans tous les domaines scientifiques, à l’exception des sciences médicales et nucléaires.
Dans les années 1960, les tensions communautaires en Belgique, en particulier dans les universités de Louvain et de Bruxelles, eurent un grand impact sur la structure du FNRS qui était considéré comme un bastion majoritairement francophone. Les critiques connaissent le retard flamand ressenti dans la recherche scientifique au NFWO. Par conséquent, en 1970, le budget du fonds et les subventions du gouvernement furent répartis par communauté linguistique. Le ton était donné en vue d’une nouvelle division de la structure du Fonds. En 1992, de nouveaux statuts virent le jour qui divisaient le fonds en deux institutions autonomes de facto, une néerlandophone et une francophone. En 2005 eut lieu la scission définitive en deux instituts distincts : le FWO-Vlaanderen et le F.R.S.-FNRS.
Projets
Le vol stratosphérique de Piccard à bord du FNRS-1 fut l’un des projets de prestige du FNRS. |
Dès sa fondation, le FNRS joua un rôle important dans l’attribution des mandats pour la recherche doctorale. La recherche individuelle, comme celle des prix Nobel Corneel Heymans et Jules Bordet, fut également soutenue grâce à un subside étalé parfois sur des dizaines d’années tandis que Paul Bordet recevait un subside bien défini pour sa recherche sur un sérum sanguin. Suite à la démocratisation de l’enseignement supérieur suivie par la loi sur l’expansion universitaire de 1965, le nombre de demandes de mandats faites surtout par des étudiants doctorants monta rapidement.
Mais le FNRS se lança sans tarder dans des projets de recherche bien circonscrits, souvent spectaculaires. Au cours de l’entre-deux-guerres, le financement fut souvent attribué à des projets utiles, novateurs et pacifiques, et qui étaient susceptibles de donner à la Belgique en tant que pays sa place sur la carte, ou d’enrichir la nation. Le premier projet vit le jour en 1930. À l’époque, il fut placé sous l’autorité de l’archéologue Fernand Mayence du Musée Royal d’Art et d’Histoire et profita de l’appui financier du FNRS : une métropole romaine fut mise au jour en Syrie. Au cours des années suivantes, les archéologues purent compter sur le soutien financier du FNRS, notamment lors des fouilles d’Alba Fucens en Italie et d’un site préhistorique en Iran. Le musée royal du Cinquantenaire accueillit les découvertes. De nouveaux projets, assez prestigieux, suivirent rapidement : par exemple, parlant à l’imagination, les vols stratosphériques du professeur de physique Auguste Piccard dans son ballon, le FNRS-1 (1931) et les expériences du même professeur dans les fonds abyssaux à bord du tout premier bathyscaphe, le FNRS-2. Quant à la création de la station de recherche internationale du Jungfraujoch en 1931 et à l’expédition des îles de Pâques (1934), elles n’avaient aucune utilité commerciale.
Dessin de la première machine à calculer électronique mise au point en Belgique, 1955. Source : FNRS. |
Mais l’exploration scientifique du massif du Ruwenzori en 1932, la recherche hydrobiologique et piscicologique du lac Tanganyika en 1946 et la construction d’un hélicoptère par Nicolas Florine (1933) en avaient bel et bien une.
Après la Seconde Guerre mondiale, la « Big Science » vit le jour, exercice scientifique à l’orientation plus internationale, avec des rôles de premier plan pour les sciences de l’espace et la physique nucléaire. Le FNRS s’engagea aussi : en 1945, il créa une commission chargée de soumettre la branche scientifique de la physique nucléaire à une étude. Au cours des années 1960 et 1970, le soutien à la création et à l’équipement du nouveau Laboratoire de physique nucléaire de l’Université de Gand se renforça. En outre, les savants purent compter sur une aide pour acheter et concevoir les appareils scientifiques toujours plus grands, destinés à l’exploitation des « big data ». En 1955, le FNRS devint propriétaire d’une machine à calculer électronique géante conçue en Belgique, la toute première à y être conçue. À partir de 1950, la recherche finança le développement du microscope électronique au Centre d’Électromicroscopie
L’expédition de la Grande Barrière de Corail donna à la Belgique quantité de trésors naturels de grande valeur. Source Motty, dans Wikimedia Commons. |
du gantois Gaston Vandermeersche, du professeur d’université Joseph Lauweryns de Louvain et du professeur d’université bruxellois Luc Bouwens. Au cours des années 60, le Centre de Calcul digital de Gand reçut à plusieurs reprises des subsides du FNRS. En 1974, le FNRS participa à la création de la Fondation Européenne de la Science. Parallèlement, il y eut aussi, comme d’habitude, des projets « classiques » comme l’expédition au pôle Sud de Gaston de Gerlache, l’élaboration d’une carte des îles Galapagos, l’expédition de la Grande Barrière de Corail sous la direction de Marcel Dubuisson et les études géomorphologiques et géochronologiques du quartaire de la VUB.
À partir de 1970, après la scission en un fonds francophone et un fonds néerlandophone, les projets de recherche et les mandats se répartirent dans leur domaine linguistique propre.
Siège
Depuis sa fondation, le NFWO (FWO-Flandre, F.R.S – FNRS) se trouve rue d’Egmont, à Bruxelles, où il occupe plusieurs bâtiments.
Finances
Au cours des dix premières années de son existence, le NFWO a donné près de 45 millions de francs pour soutenir la science. La majeure partie des subsides a été consacrée au soutien des aspirants, des associés et des chercheurs. Jusqu’en 1947, le NFWO a pu compter à 100% sur les dons du secteur privé. Puis le gouvernement a mis à son tour la main à la poche en concédant un subside annuel royal, qui devint alors la source de revenus la plus importante. Après quelque temps, le Fonds put compter de plus en plus sur les intérêts du capital obtenu. Cette source de revenus augmenta au fil des années d’après-guerre jusqu’à devenir la plus importante tandis que, au même moment, les subsides du gouvernement répondaient au nombre croissant de demandes de mandats et de projets. Du côté francophone, le spectacle de télévision Télévie constitue depuis 1989 et jusqu’à aujourd’hui une source importante de revenus. Ici aussi, on fait appel aux dons des particuliers.
Notes
- ↑ Dans les pays voisins, la scientifisation avait bien fait son apparition. Des exemples célèbres : Electric et AT&T aux États-Unis et, en Allemagne, Kodak, Siemens et AEG.
- ↑ Des institutions semblables, des entreprises sous contrôle gouvernemental ou privées et des bureaux-conseils pour la promotion de la science, virent le jour dans toute l’Europe d’après-guerre. En 1915, par exemple, le gouvernement britannique mit sur pied un Advisory Council for Scientific Research ; les États-Unis suivirent avec un National Research Council en 1916 (soutenu et co-administré par le Carnegie Institute of Washington et la Rockefeller Foundation) et, en France, l’Académie des Sciences devint responsable de l’organisation de la recherche expérimentale, y compris ses applications à l’industrie.